Les Principia de Newton dans l'encyclopédie de Diderot et d'Alembert

L'Encyclopédie parait alors qu'en France  les partisans de Newton prennent le dessus sur ceux de Descartes. Les  Principia font l'objet de quatre articles dans l'Encyclopédie: Newtonianime, Woltrope, Gravitation, Gravité.

 Sommaire

  • Les dates
  • Les Principia
  • Les articles de l'encyclopédie
    • Newtonianisme
    • Wolstrope
    • Gravitation
    • Gravité
  • Une démonstration de Newton: proposition XI problème VI
  • La gravité dans les institutions de physique de Mme du Chatelet
  • Sites et références
Newton est né à Wolstrope en 1642 de parents fermiers.
Après la publication des Principia il deviendra directeur de la monnaie, président du Royal collège,...
Il mourra en 1727 et sera enterré à Westminster  
Voltaire fut un fervent propagandiste de Newton.
Dans sa préface il rend hommage à Mme du Chatelet,  inspiratrice et amante.
Voltaire écrira d'autres textes scientifiques: Doutes sur la mesure des forces motrices, la question de la chaleur et de sa propagation.
Frontispice des Principia.
Avant la traduction de Mme du Chatelet on connaissait surtout en France les ouvrages des Newtonniens anglais  plus faciles d’accès
Emilie marquise du Chatelet traduisit en français les Principia de Newton. C'est aussi l'auteur des Institutions de Physique, ouvrage dédié à son fils qui peut être considéré comme une source secondaire de l'encyclopédie en particulier à cause des articles de Formey qui s'en inspira. 
Dans PESANTEUR on trouve que l'article GRAVITE est du à Formey rédacteur d'HYPOTHESE et d'autres articles souvent inspirés des Institutions de Physique de Mme du Chatelet

Les dates 

La première édition des Principia date de 1687, son tirage est de 200 à 300 exemplaires.
Il y aura en tout 3 éditions, la dernière en 1726, présentant des différences sur les démonstrations mais toutes en latin (1)

Pour un public français les Principia sont peu accessibles  mais il existe des écrits "newtoniens" en anglais plus compréhensibles: ceux de Keill. (traduit du latin en 1720), Pemberton (1723) et  Gravessande(1728)

Newton meurt en 1727.

A Paris dans les années 1730-35 la bataille fait rage entre les partisans de Descartes et ses tourbillons et ceux de Newton. Elle se conclut en faveur de la gravitation universelle sous l'influence de Voltaire, Clairot, Buffon et Maupertuis.
Voltaire écrit en 1738 "les éléments de la philosophie de Newton" ou il montre celui-ci comme un champion de la philosophie naturelle
En 1740 l'académie récompense 3 mémoires qui expliquent les marées par l'attraction.

En 1741 parait une version commentée des Principia par Le Seur et Jaquier (3 volumes en latin)

La traduction française des Principia , basée sur la 3e édition, parait en 1756, c'est l'oeuvre posthume de la marquise du Chatelet relue par Clairaut.

Les 17 premiers volumes de texte de l'Encyclopédie paraissent de 1751 à 1765. Les dix derniers paraissent simultanément à Genève en 1765 mais il est évident que leur rédaction n'a pas été simultanée

Dans  le tome XI (de N à P)  de l'Encyclopédie. Il ne s'y trouve pas d'article sur Newton mais un sur le NEWTONIANISME par d'Alembert sur presque 3 pages.

Dans le  tome XVII ( de V à W) ,paru la même année,  on trouve un article de 5 pages sur Newton par Louis de Jaucourt  à ...WOLSTROPE, ville natale de Newton. Il est évident qu'il s'agit d'un "rattrapage",  il eut fallu  écrire un article NEWTON à la mesure de sa renommée grandissante  mais comme c'est impossible ( le tome XI étant paru) on en rajoute un  là ou on peut sur la vie de Newton..

Dans la table analytique publiée en 1780 on a à NEWTONIANISME  un résumé des "principes de la philosophie Nextonienne" avec   des  renvois vers les articles  NEWTONIANISME, WOLSTROPE, GRAVITE, GRAVITATION mais aussi 28 autres renvois sur les différents thèmes que Newton a traité

Les Principia

Les Principia commencent par des  définitions et d'axiomes.
Les 3 axiomes  sont

  1. "Tout corps persévère dans l'état de repos ou de mouvement uniforme en ligne droite dans lequel il se trouve , à moins que quelque force n'agisse sur lui et ne le contraigne à changer d'état
  2. les changements qui arrivent dans le mouvement sont proportionnels à la force motrice, et se font dans la ligne droite dans laquelle cette force a été imprimée
  3. L'action est toujours égale à la réaction; c'est à dire que les actions de deux corps l'un sur l'autre sont toujours égales, ce dans des directions contraires (2)"

 La suite se présente en  3 livres:
  • Livre I . Sur le mouvement des corps. Il expose la  "théorie de la gravitation des astres"
  • Livre II. Sur le mouvement des corps.  Il traite  du mouvement réel des corps soumis à une résistance du milieu cad de mécanique des fluides. La fin du livre attaque le système des tourbillons de Descartes.
  • Livre III. Sur le système du monde.  C'est la suite du premier livre où on explique les "phénomènes célestes" à l'aide des lois exposées dans le premier livre.
Je m'avoue quasi incapable de suivre les démonstrations des Principia (voir plus bas un exemple de difficulté). Le calcul différentiel était alors dans les limbes et les démonstrations "géométriques" sont d'une subtilité opaque. La méthode des "premières et des dernières raisons" (3) ou on considère géométriquement des rapports x'/y' est très difficile à suivre.

Newton n'était pas le premier à proposer une loi suivant l'inverse des carrés des distances(4) mais c'est lui qui a prouvé que cette loi impliquait une conique pour trajectoire.

Les articles de l'encyclopédie

Newtonianisme 

Le grand principe de cette philosophie "c'est la gravitation universelle, ce principe n'est pas nouveau. Kepler, longtemps auparavant, en avait donné les premières idées dans son Introd.. ad mot. martis. (4) il découvrit même quelques propriétés qui en résultaient, et les effets que la gravité pouvait produire dans les mouvements des planètes ; mais la gloire de porter ce principe jusqu'à la démonstration physique, était réservée au philosophe anglais".

D'Alembert expose  d'abord des données d'expérience.
 " 1°. que les satellites de Jupiter décrivent autour de cette planète des aires proportionnelles aux temps, et que les temps de leurs révolutions sont entre eux en raison sesquiplée de leurs distances au centre de Jupiter, observation sur laquelle tous les Astronomes s'accordent. 2°. Le même phénomène a lieu dans les satellites de Saturne, considérés par rapport à Saturne, et dans la Lune considérée par rapport à la Terre. 3°. Les temps des révolutions des planètes premières autour du Soleil sont en raison sesquiplée de leurs moyennes distances au Soleil. 4°. Les planètes premières ne décrivent point autour de la terre des aires proportionnelles aux temps : elles paraissent quelquefois stationnaires, quelquefois rétrogrades par rapport à elle."

A l'époque les satellites de Jupiter, de Saturne et la lune ont des trajectoires directement compatibles avec des ellipses mais les planètes" premières" ont des comportements complexes expliqués alors  par des   èpicycles autour de la terre (ce qui ne contredit pas la Bible)

Tous ces phénomènes, écrit d'Alembert,  peuvent s'expliquer par l'existence d'une "force centrale" qui détourne d'une trajectoire rectiligne les satellites et les planètes, dans le cas de la terre, le centre de cette force est le soleil. Cette force est la gravité.
Cette force est générale: "tous les corps gravitent vers toutes les planètes" et "la force par laquelle un corps en attire un autre est proportionnelle à la quantité de matière que chacun contient".
"Le centre de gravité commun du soleil et des planètes est au repos"
"Les planètes se meuvent dans des ellipses dont le centre du Soleil est le foyer, et décrivent des aires autour du Soleil qui sont proportionnelles aux temps."
Ce principe est général dans le cas de deux corps et s'applique aussi aux trajectoires des comètes mais dans le cas des satellites de Jupiter, Saturne influence aussi leur trajectoire et la trajectoire est plus complexe, il en est de même pour la trajectoire de la lune à cause de l'influence du soleil. La lune est responsable des marées.
"L'axe de chaque planète, ou le diamètre qui joint ses pôles, est plus petit que le diamètre de son équateur." du fait de sa rotation.

L'exposé de d'Alembert et très clair mais ignore complètement le livre II qui traite du mouvement d'un corps soumis à une résistance d'abord proportionnelle à la vitesse puis proportionnelle au carré de la vitesse. Les livres I et III traitent de mécanique céleste, sujet hautement philosophique à l'époque, alors que le livre II traite de mécanique terrestre, sujet pratique dont le traitement aurait eu de  l’intérêt si les calculs de Newton permettaient de prévoir exactement la trajectoire d'un boulet de canon ou de concevoir un navire, ce qui n'était pas le cas.
D'Alembert cite enfin les objections à la théorie.
"Les objections qu'on a faites contre cette philosophie ont surtout pour objet le principe de la gravitation universelle ; quelques-uns regardent cette gravitation prétendue comme une qualité occulte, les autres la traitent de cause miraculeuse et surnaturelle, qui doit être bannie de la saine philosophie ; d'autres la rejettent, comme déduisant le système des tourbillons ; d'autres comme supposant le vide ; on trouvera la réponse des Newtoniens à ces objections dans les articles GRAVITE, ATTRACTION, TOURBILLON, etc."

Pour le renvoi à GRAVITE il y a en vérité deux articles: GRAVITATION par d'Alembert  et GRAVITE qui aurait du être écrit  par  Formey "qui l'a tiré en partie des institutions de physique de Mme du Chatelet" mais qui est en vérité principalement de d'Alembert.
Ces deux articles sont un peu "concurrents", ce qui s'explique par le fait que le sujet était à la mode et que les éditeurs craignaient plus la pénurie d'articles que l’abondance.

Aujourd'hui le rédacteur d'un article d'encyclopédie  doit être "neutre" et concis, en ce temps là il devait dissimuler certaines de ses opinions mais il était libre de développer à sa guise, d'exprimer son point de vue et de commettre de longues digressions. Par exemple l'article "absent" comprend 2 pages (6) de calcul des probabilités visant à répondre à la question: " A partir de quel moment une personne absente doit-elle être considérée morte ? " (question d’intérêt pratique pour les successions). Perronet rédige l'article "épingle", il ne va pas faire de digression mais expliquer durant 5 pages chacune des 18 opérations élémentaires visant à réaliser une épingle. Le but de Perronet est d’analyser scientifiquement le travail (ce qui conduira plus tard à l’œuvre de Taylor).

L'article Wolstrope

"Bourg d'Angleterre, dans le comté de Lincoln, où naquit Isaac Newton, le jour de noël, v. s. de l'an 1642."
Cet article sur la ville natale de Newton va permettre d'exposer la biographie de Newton qui aurait du se trouver dans le tome XI.
L'article va aussi détailler la genèse des Principia.
"Enfin, en 1687, M. Newton révéla ce qu'il était ; et ses principes de philosophie virent le jour à Londres, in -4°. sous le titre de philosophiae naturalis principia mathematica. Il en parut une seconde édition à Cambridge en 1713, in -4°. avec des additions et des corrections de l'auteur, et M. Cotes eut soin de cette édition. On en donna une troisième édition à Amsterdam, en 1714, in -4°. La dernière beaucoup meilleure que les précédentes, a été faite à Londres en 1726, in -4°. sous la direction du docteur Pemberton."
Le contenu du livre est évoqué brièvement:
"Deux théories principales dominent dans les principes mathématiques, celle des forces centrales, et celle de la résistance des milieux au mouvement ; toutes deux presque entièrement neuves, et traitées selon la sublime géométrie de l'auteur. 

 Kepler avait trouvé par les observations célestes de Ticho-Brahé, 1. que les mêmes planètes décrivent autour du soleil, des aires égales en des temps égaux ; 2. que leurs orbites sont des ellipses, le soleil étant dans le foyer commun ; 3. qu'en différentes planètes les carrés des temps périodiques, sont en raison des cubes des axes transverses de leurs orbites. Par le premier de ces phénomènes, M. Newton démontra que les planètes sont attirées vers le soleil au centre ; il déduisit du second, que la force de l'attraction est en raison inverse des carrés des distances des planètes de leur centre ; et du troisième, que la même force centripète agit sur toutes les planètes"

On note que le livre II n'est pas ignoré, au contraire de l'article de d'Alembert. "La résistance des milieux au mouvement" est considérée comme une des deux avancées de Newton (mais aucun développement ne lui est consacrée)

L'article gravitation

Il a été écrit par d'Alembert dans le tome VII de 1757, donc seulement  un an après la traduction des Principia par la marquise du Chatelet. D'Alembert ne s'est probablement jamais servi de cette traduction mais de l'édition commentée de Le Seur et Jaquier.

"Suivant le système de Physique établi par Newton, et reçu maintenant par un grand nombre de philosophes, chaque particule de matière pèse ou gravite vers chaque autre particule"
L'article se divise en 4 parties.

  1. Réflexions philosophiques sur le système de la gravitation universelle..
  2. Loi générale de la gravitation.
  3. Manière de trouver la gravitation d'un corps vers un autre.
  4. Usage du système de gravitation pour trouver la masse des planètes.
On retrouve dans l'article la même discussion que dans l'article FORCE sur  l'équation du mouvement.
Est ce  1/2 gt²   ou  gt² ?
Newton dans sa première édition donnait gt², ce qui a été corrigé par Bernouilli en 1711 et repris dans les éditions suivantes des Principia.  D'Alembert dans l'article FORCE prend donc 1/2gt² mais dans cet article, en considérant le travail d'Euler de 1749 sur le mouvement de Saturne, il croit y déceler une erreur et  revient à gt². L'encyclopédie contient donc dans le même volume deux articles rédigés par le même auteur avec deux conclusions différentes.

L'article gravité

Il aurait du être rédigé par Formey "en  s'inspirant des Institutions de Physique de madame du Chatelet"(7). paru en 1740  mais il fut rédigé par d'Alembert et  comporte de grosses différences "philosophiques" avec la position de Mme du Chatelet.
L'article commence par une réfutation des tourbillons de Descartes qui provoqueraient une attraction vers l'axe de la terre et non vers son centre même avec la "correction" de Huygens 
On a ensuite "des preuves de la gravité universelle" formés surtout d'exemples.
Le point délicat est de savoir "quelle est la cause de cette tendance mutuelle...que les corps ont les uns vers les autres"
Clarke prétend que c'est une force que" le Tout Puissant a imprimée"
Gravessande déclare raisonnablement que la  cause est inconnue et que la gravité est une simple loi.
Cotes prétend que la gravité est "une qualité première de la matière"
Newton pense " qu'il y a dans la nature un milieu beaucoup plus subtil que l'air", support de la lumière, du magnétisme et de la gravité. D'Alembert pense que si Newton a donné cette explication dans son optique c'était "pour rassurer quelques personnes que l'attraction (sans cause) avaient révolté

  1. Alors que Galilée publiait en 1632  son  "Dialogo", puis  en 1638 son "Discorso"  en langue "vulgaire".
  2. Un peu modifiés dans les commentaires de Mme du Chatelet"
    Que tout corps persévère de lui-même (
    en l’absence de force appliquée) dans son état de repos ou de mouvement uniforme en ligne droite.Que le changement ( l'accélération)  qui arrive dans le mouvement est toujours proportionnel à la force motrice, et se fait dans la direction de cette force.Que l’action et la réaction sont toujours égales et contraires 
  3. On a à l’époque pour calculer des aires la méthode des indivisibles et la méthode des fluxions, publiée par Newton en 1666 mais abandonnée ensuite par lui 
  4. Bullialdus (Bouliau). Astronomica philolaica  (Paris 1645) p 23 
  5. Chapitre de l'Astronomia nova traitant de l'orbite de Mars.
  6. Sur l'édition Pellet in quarto, soit une page sur l'édition in folio
  7. C'est ce que précise l'article PESANTEUR d'auteur inconnu. 

Figure de De motu Corporum in Conicic Sectionibus excentris 
Détail corrigé

Exemple d'une démonstration de Newton.

Proposition XI problème VI

Un corps faisant sa révolution dans une ellipse; on demande la loi de la force centripète, lorsqu'elle tend vers un des foyers. 

Du Chatelet p 66 (Dunod p 45), Newton p 50

Soient S le foyer de l'ellipse, E la rencontre de SP avec le diamètre DK, x celle de la même ligne SP avec l'ordonnée Qv, Q x PR le parallélogramme fait sur Px et  Qx.

On voit d'abord que EP est égal au demi grand axe AC; car menant par l'autre foyer H la droite HI parallèle à DK, il est clair que EI sera égale à SE à cause de l'égalité qui est entre CH et CS et par conséquent PE sera égale à la moitié de la somme de PI et de PS ou ce qui revient au même à AC moitié de de la somme de PS et de  PH, puisqu'il suit de ce que HI  est parallèle à RP et de ce que les angles HPZ et IPR sont égaux, que HP =PI . 

Abaissant ensuite QT perpendiculaire à SP et nommant L le paramètre du grand axe, c'est à dire 2BC²/AC on verra que L x QR : L x PV :: QR : Pv, c'est à dire :: PE (ou AC/2) : PC mais L x Pv : Gv x vP :: L : Gv  et Gv x  vP : Qv² :: PC² : CD² ; de plus Qv²: Qx² en raison d'égalité ( cor 1 lemme 7) lorsque les points P et Q coïncident , et Qx² ou Qv²: QT ²:: EP² : PF², c'est à dire :: CA² : PF² ou ( lemme 12) :: CD²: CB²; donc en composant toutes ces raisons on aura L x QR : QT² :: AC x L PC² x CD² ou :: 2 CB² x PC² x CD² : PC x Gv x CD² ou  2CB² x PC² : PC x Gv x CD² x CB² ou :: PC : Gv. Or puisque :2PC & Gv sont égales lorsque les points P et Q coïncident, les quantités L X QR et QT² qui leur dont proportionnelles seront donc égales aussi. Multipliant présentement ces quantités égales par SR/QR on aura L x SP² = (SP² x QT²) /QR. donc par les corollaires 1 et 5 de la proposition 6 la force centripète sera réciproquement comme L x SP²  c'est à dire en raison inverse de SP². CQFT 

Notations
A : B :: C : D veut dire  que A et B sont dans la même proportion que C et D autrement dit que A/B=C/D 
Dans le texte latin cela s'écrit:
erit A ad B ut C ad D
on a aussi: æquatur (=), quad (carré), ergo (par conséquent),...
Exemple: L x Pv ad GvP ut L ad Gv  signifie (L x Pv)/(Gv x vP) = L/Gv

Préliminaire 
Newton a démontré "que si un corps décrit autour d'un centre immobile un orbe quelconque ... la force centripète sera réciproquement comme  (SP²x QT²)/Qr quand P et Q coïncident" (la flèche est proportionnelle à la Force et au  Temps au carré. Proposition VI)
Toutes les démonstrations de la valeur de la force centripète dans le cas "des coniques excentriques" se basent sur le calcul de (SP²xQT²)/Qr 

Démonstration
On prend sur l'ellipse 2 points Q et P que l'on va rapprocher
DK est // à la tangente à l'ellipse en P

On démontre d'abord: EP = AC

HI//DK, CH=CS =>  EI=SE
PE= (PI+PS)/2
HI//RP, HPZ=IPR => HP=PI
PE=(HP+PS)/2=AC ( HP+PS définit un point de l'ellipse (somme des distances aux foyers), de même que 2AC)

On prend L =2BC²/AC
NB: le paramètre moderne (noté p) d'une ellipse est la moitié du "Latus rectum": corde perpendiculaire à l'axe principal passant par un foyer
La longueur du latus rectum d’une ellipse est égale à 2 fois le carré de la longueur de l’axe conjugué
divisé par la longueur de l’axe principal (p = 2L= BC²/AC)

On démontre ensuite  L x QR=QT²

De façon ahurissante on va considérer l'équation (1):

L x QR

L x QR

L x Pv

Gv x vP

Qv²

───

=

────

x

─────

x

────

x

──

QT²

L x Pv

Gv x vP

Qv²

QT²


Que l'on transformera en (2) :

L x QR

AC

L

PC²

CD²

───

=

───

x

──

x

───

x

───

QT²

PC

Gv

CD²

CB²


Puis en: 

L x QR

2PC

───

=

───

QT²

Gv


D'où on conclura quand Q tend vers P: 

L x QR

 

1

───

=

 

QT²

 

 


L x Qr = QT²

Soit en multipliant par SP²/Qr

L x SP²

SP² x QT²


=

──────


Qr


Or Newton a démontré dans le cas général  (proposition VI corolaires 1et 5 ) "que la force centripète sera réciproquement comme (SP²x QT²)/Qr quand P et Q "coïncident"";
Donc la force est proportionnelle à 1/SP² cqfd.


Il reste simplement à justifier la transformation de (1) en (2)
Premier terme
(L+Qr)/(L+Pv)= Qr/Pv=PE/PC=AC/PC (Pxv et PEC semblables et PE=AC)
Second terme
(L x Pv)/(Gv x vP)=L/Gv
Troisième terme
(Gv x vP)/Qv²= PC²/CD² (vrai si Q=D; dans le cas d'un cercle la puissance de v est vP.Gv=Qv², celle de C est CP²=CD², donc Gv.vP/Qv²=PC²/CD², propriété conservée par une transformation affine )
Quatrième terme
 (en utilisant Qx²/QT² -> 1 ( lemme VII corolaire 2) )
Qx²/QT²=Qv²/QT²=EP²/PF²=CA²/PF²=CD²/CB² (des parallélogrammes inscrits dont les diagonales sont des diamètres conjugués ont même aire, CA x CB = DC x PF)



Mme Du Châtelet s’efforce dans cet ouvrage, à l’origine un manuel destiné à son fils, de concilier la physique de Newton avec la métaphysique de Leibniz. Elle exprime une volonté de fonder philosophiquement la science empirique : « L’expérience est le bâton que la nature a donné à nous autres aveugles pour nous conduire dans nos recherches » 

La gravité dans les Institutions de physique de la marquise du Chatelet

La marquise commence par rappeler la théorie des tourbillons de Descartes  " la terre est entouré d'un grand tourbillon de matière subtile... qui l'emporte dans sa rotation journalière". L'objection est que la chute des corps ne devrait pas se produire mais Huygens a proposé que la matière subtile se meuve en tout sens et  aille 17 fois plus vite que la terre...

Un corps tend à se mouvoir  en ligne droite , un mouvement en ligne courbe est donc un mouvement composé. Kepler a découvert que "les planètes tournant autour du soleil décrivent des aires égales en temps égaux" et que "le temps qu'une planète emploie à faire la révolution autour du soleil  est toujours proportionnel à la racine carré du cube de sa moyenne distance à cet astre"

"Newton en cherchant à connaitre la cause de ces lois à démontrer à l'aide de la plus sublime géométrie.
Que si un  corps qui se meut est attiré vers un centre mobile ou immobile , il décrira autour de ce centre des aires proportionnelles au temps et réciproquement ..
Que si un corps qui se meut autour d'un centre qui l'attire achève sa révolution en un temps proportionnel à la racine carrée du cube de la moyenne distance à ce centre, la force qui l'attire diminue comme le carré de la distance au centre vers lequel il est attiré et réciproquement..."
M du Chatelet s'intéresse ensuite à l'orbite de la lune puis à la détermination de la forme exacte de la terre à l'aide des différences de gravité.

Pour les Newtoniens "cette attraction est selon eux une propriété donné par Dieu à toute la matière, par laquelle toutes ses parties tendent l'une vers l'autre en raison directe de leur masse et en raison inverse du carré de leurs distances".
Certains newtoniens  proposent même une loi d'attraction rendant compte de la cohésion des corps  a/x²+ b/x3 + c/x4+ .. .

La marquise trouve tout de même que cette force à distance  sent le soufre et elle s’élève contre  toute explication "globale"  par l'attraction, elle  prétend que ce n'est qu'un phénomène et non une propriété donnée par dieu à la matière: " il faut chercher par les lois de la mécanique une matière capable par son mouvement de produire les effets que l'on attribue à l'attraction"

Sites et références