Histoire des souffleries

Dès le début du XVIII éme siècle l’homme pense que voler comme les oiseaux n’est pas un rêve bien que les théoriciens ne soient pas très optimistes quant à cette possibilité : il faut faire des essais.

Les études en aérodynamique progressent grâce à deux inventions : le manège d’essai de Benjamin Robins (1707-1751) et le tube de Pitot (1695-17771). Les travaux de l’époque tentent de trouver la loi de résistance de l’air pour des formes simples ou de tester l’efficacité de formes d’ailes. Une idée s’impose peu à peu : il suffit d’un moteur et d’une hélice qui donnera de la vitesse à l’engin et si celui-ci à la forme appropriée il décollera.

Plus tard on suspend les prototypes à des câbles ou on les installe sur des voitures ou sur des trains. Il n’est pas alors évident qu’il est équivalent de faire se déplacer un objet à une certaine vitesse ou de le laisser fixe et de le soumettre à un courant d’air de la même vitesse. 

C’est en 1871 qu’apparait la première soufflerie construite en Angleterre par Francis Wenham. C’est un tunnel de 4m de long, son ventilateur est mu par une machine à vapeur.

Peu après la course au décollage du plus lourd que l’air s’accélère. Langley construit un grand manège d’essai et lance son prototype à l’aide d’une catapulte sur le Potomac.
En 1901 les frères Wright testent une maquette de leur merveilleux engin dans une soufflerie et ils décolleront deux ans plus tard.

En France beaucoup s’intéressent à l’aéronautique.
Clément Ader construit successivement 3 avions de 1890 à 1897 dont personne ne sait vraiment s’ils ont quitté le sol.
Le colonel Charles Renard fonde l’établissement central de l’aérostation militaire en 1877 à Meudon.
Le capitaine Ferdinand Ferber y fait des essais de planeur sur fil tendu. Le planeur prend de la vitesse suspendu au fil, en bout de course le planeur se décroche et réalise un vol d’une cinquantaine de mètres.
C’est aussi le temps des amateurs fortunés : Armand de Gramont, duc de Guiche, consacre une partie de sa fortune à des expériences d’aérodynamique avant la guerre mais… se tourne ensuite vers l’optique.

Eiffel fait partie des amateurs fortunés. Il sera très tôt préoccupé par la résistance de ses ouvrages au vent mais ne s’investira vraiment dans l’aérodynamique qu’après s’être complètement retiré des affaires après le scandale de Panama en 1889.
Après ses démêlés judiciaires il s’intéresse à la météorologie puis, vers 1900, à l’aérodynamique : il a alors 68 ans mais il lui reste 23 ans à vivre.
Il constate qu’à la question de savoir quelle masse peut soulever une aile « les chiffres de avancées par les premières expériences (Wright, Ferber) varient du simple au décuple » et même que pour la valeur primordiale de la résistance spécifique de l’air sur un plan normal au vent, les chiffres entre Dines, Langley et Lilienthal varient du simple au double ». Il décide de faire sur ses propres fonds des expériences. Il s’adjoint une équipe avec Léon Rith et Auguste Lapresle et installe un appareil de chute au second étage de la tour Eiffel. L’appareil descend par gravité et enregistre simultanément la résistance et la position à l’aide d’un cylindre tournant entrainé par un galet qui roule sur le cable. Pour obtenir la vitesse, le stylet d’écriture est monté sur un diapason : le tracé résultant est ainsi gradué en temps par les petites ondulations sinusoïdales du diapason. L’appareil (exposé aujourd’hui à l’intérieur de la soufflerie d’Auteuil) chute sur 115m et atteint une vitesse de 40m/s. Eiffel confirme ainsi que la résistance de l’air (R) s’obtient par la formule :
R= KSV²
Ou S est la surface, V la vitesse et K un coefficient dépendant de la forme et de la densité de l’air.

Il publie ses résultats en 1906 dans « recherches expérimentales sur la résistance de l’air à la tour Eiffel » , ils corroborent les résultats obtenus par d’autres sur des formes simples comme Stanton au National Physical Laboratory et en apportent de nouveaux sur les profils d’ailes.
Pour aller plus loin Eiffel fait construire en 1905, toujours à ses frais, une soufflerie au Champ de Mars pour laquella il déposera un brevet seulement en 1917. C’est « Un ventilateur aspirant d’une puissance de 70 chevaux fait passer dans une chambre d’expériences parfaitement close une colonne d’air ayant un diamètre de 1,50 mètre et une vitesse de 5 à 20 mètres par seconde, sans qu’il en résulte aucun remous dans cette chambre. La surface essayée, placée dans ce courant, est reliée à une balance spéciale qui donne l’effort en grandeur, direction et point d’application. La vitesse est mesurée à l’aide d’un tube Pitot relié à un manomètre très sensible. En outre, on détermine la répartition des pressions aux différents points de la surface en perçant celle-ci de trous très fins que l’on fait communiquer avec un manomètre très sensible ».

La soufflerie du Champ de Mars est jugé inesthétique, aussi Eiffel doit il construire une nouvelle soufflerie à Auteuil : c’est l’actuelle soufflerie du 67 rue Boileau. Elle est un peu plus grande avec deux tunnels l’un de 2M permettant une vitesse de 30m/s l’autre de 1m permettant 50m/s. L’originalité de ces souffleries est qu’il ne s’agit pas de simples tunnels de section constante mais d’un collecteur d’air allant s’amincissant vers une chambre d’expérience rectangulaire suivie d’un diffuseur allant s’élargissant vers le ventilateur. Cette disposition permet une vitesse supérieure au niveau de l’objet essayé et garanti un flux homogène.

Dans son ouvrage « La résistance de l’air et l’aviation » de 1910 Eiffel propose pour les profils d’aile une courbe qu’il appelle polaire. Il s’agit du tracé de Cx et Cz (appelés alors Kx et Ky(*)) en fonction de l’angle d’incidence. Il ajoute en 1914 une échelle auxiliaire Kx/Ky en haut du graphique. En traçant une droite depuis l’origine on voit ainsi sur le graphique que Kx/Ky=0,08 est obtenu pour une incidence de 6°


Pour les avions complets Eiffel propose une méthode graphique pour déterminer directement la puissance nécessaire Q en fonction du poids P , de la vitesse souhaitée V et de l’angle d’incidence. SI Rx et Ry constitue les efforts unitaires (trainée, portance) on a P= Rx V3 (**) et Q=Rx V2 . En prenant des coordonnées logarithmiques l’influence de la vitesse se traduit par une droite de pente 3/2 . Eiffel gradue directement sa polaire en P et V pour 100km/h, pour les autres vitesses il suffit de décaler l’échelle en suivant la droite des vitesses tracée. Le graphique de droite, de l’appareil Dorand, présente les échelles P (en kgp) et Q (en CV) qui sont les indications à l’extérieur des axes.


(*) Plus exactement Kx=Cx ρ, Ky=Cz ρ ou ρ est la masse volumique de l’air.(**) une puissance est le produit d’une force par une vitesse, les forces de trainée et de portance sont en V2

Du coté universitaire c’est grâce à la donation d’Henry Deutsch de la Meurthe que sera créé l’institut aérotechnique (IAT) à St Cyr pour "poursuivre les recherches théoriques et pratiques tendant au perfectionnement des engins de la locomotion aérienne sous toutes ses formes". Inauguré en 1911, il comporte une voie ferrée de 1400m de long. Le matériel à tester est monté sur des wagons qui peuvent atteindre 80km/h.. En 1912 on ajoute un manège de 19 m de rayon pouvant atteindre 100km/h.
L’IAT, sous la direction de Charles Maurain, s’était donc orientée vers le déplacement dans l’air des objets plutôt que vers les souffleries mais les bons résultats de la soufflerie d’Auteuil font décider en 1914 de construire une soufflerie « système Eiffel » qui ne sera achevée qu’en 1919.


L’Allemagne est très active, particulièrement à Göttingen. Là travaille Prandtl, le directeur de l’institut de mécanique des fluides Max Planck. En 1908 il fait construire sa première soufflerie de 2m qui sera la première à être en circuit fermé, c'est-à-dire que l’air expulsé par le ventilateur est reconduit par un tunnel circulaire à l’entrée de la chambre d’expérience.
Prandtl invente aussi une sonde (tube de Pitot double) qui va permettre de mesurer la vitesse d’un avion par rapport au vent. Cette « antenne de Prandtl » équipera tous les avions mais sera appelé « tube de Pitot ». (Pitotrohr en allemand)
En 1916 il fera bâtir une seconde soufflerie qui reprendra le circuit fermé mais aussi le collecteur d’Eiffel et est l’archétype des souffleries modernes.

Si Eiffel est avant tout un ingénieur pour qui l’aérodynamique est une passion, Prandtl est surtout un théoricien. Les résultats de la soufflerie de Göttingen et celle d’Auteuil divergent sur les essais de sphères pour certains Reynolds : la trainée est 2,5 fois supérieure à Göttingen. Eiffel entame une nouvelle campagne de mesures avec des sphères de différents diamètres et s’aperçoit que quand on augmente la vitesse du flux il existe un seuil pour lequel la trainée diminue subitement. Prandtl trouve une explication grâce à son étude de la couche limite -qui est la zone d’interface entre un corps et un fluide dûe à la viscosité- et montre que cette chute correspond au passage de l’écoulement laminaire de la couche limite à un écoulement turbulent avec recul de son point de décollement pour un nombre de Reynolds vers 2 ou 3 105 . Dans la soufflerie Eiffel la chute se produit pour une valeur plus faible du Reynolds qu’à Göttingen, Prandtl introduit alors un écran dans sa veine pour augmenter la turbulence du flux et trouve alors que le phénomène se produit pour un Reynolds plus bas. La mesure de la transition de l’écoulement laminaire vers l’écoulement turbulent sur une sphère devait devenir pour longtemps la méthode de mesure de la qualité du flux des souffleries subsoniques.
La couche limite joue le premier rôle dans les performances d’une surface portante et son « décollement » provoque une brusque chute de la portance.
Evolution de la trainée d’une sphère en fonction du Reynolds


La mesure de vitesse des avions a donné lieu à de multiples solutions. D’abord ce fut une simple palette maintenu par un ressort dont l’inclinaison donnait la vitesse relative (indicateur Elevé) puis des combinaisons de Pitot ou de Venturi. Le Venturi avait l’avantage d’augmenter la vitesse de l’air, et donc la sensibilité de l’appareil, ce qui était nécessaire au temps des dirigeables et des avions lents.
Raoul Badin est probablement le premier équipementier aéronautique français. Il créa en 1911 le premier « anémomètre Badin », puis en 1922 le « contrôleur de vol Badin » qui rassemble tous les instruments nécessaires à la navigation (badin, indicateur de virage gyroscopique, indicateur de verticale apparente ( « bille »). Raoul Badin décéda en 1963, sa société fut reprise par Crouzet.
Toussaint Lepère ( Venturi + Pitot)Antenne Badin  à fente vers 1950Anémomètre Badin vers 1920 ( Double Venturi+ Pitot). La pression statique est mesurée par 3 trous, un déflecteur provoque une survitesse locale au niveau d’une fente créant une dépression p1 (ce système était moins sensible aux poussières et au givrage.

En Angleterre c’est au National Physical Laboratory que se déroulent les expériences. Thomas Stanton construit en 1903 une soufflerie de 60 cm de diamètre. Une nouvelle soufflerie de 1,2m x 1,2m est mise en service en 1910 puis une plus grande de 2,1 m x 2,1m en 1912. Notons que dés 1883 O. Reynolds propose d’utiliser VL/v (le nombre de Reynolds sans la masse volumique) pour faire des essais comparables à la réalité sur des maquettes à échelle réduite.

En Russie Joukoswski s’intéresse à l’effet Magnus qui explique pourquoi une balle en rotation voit sa trajectoire modifiée. L’effet de frottement est dissymétrique : d’un coté la balle entraine l’air, la pression diminue, de l’autre elle le freine, la pression augmente. La différence de pression entraine le mouvement vers le coté ou la pression est la plus faible. Ce phénomène explique non seulement les lifts du tennis mais est à la base de la compréhension de la portance des ailes.
Joukovski et Riabouchinski construisent en 1902 leur première soufflerie à Koutchino près de Moscou et fondent en 1904 l’institut de recherches aérodynamique russe qui deviendra l’institut central d’aérodynamique (TsAGI) après la révolution d’Octobre.
En étudiant les écoulements dérivant d’un potentiel, Joukovski obtiendra des profils d’aile dérivés par transformation conforme d’un cercle. Très utilisés au début de l’aviation ces profils sont pratiquement abandonnés aujourd’hui car ils demandent un raccordement tangentiel des faces supérieure (extrados) et inférieure (intrados) au bord de fuite très difficile à réaliser. Les profils actuels sont beaucoup moins « cambrés » que ceux de Joukovski.

Aux Etats Unis, c’est Albert Zahm qui fait construire à Washington dès 1901 une soufflerie grâce aux fonds d’un industriel. Il réalise de nombreux travaux sur les ailes mais son mécène meurt en 1908 entrainant l’arrêt de ses travaux. Ce n’est qu’en 1913 qu’il pourra les reprendre avec l’appui de la Navy.

A la fin de la première guerre mondiale on comptera une vingtaine de souffleries dans le monde.

Date Taille Auteur Emplacement
1901 16 x 16 in. Wright Bros. Dayton, Ohio
1901 6 x 6 ft Zahm Catholic University, Washington
1903 2 ft diamètre Stanton National Physical Laboratory, Grande Bretagne
1903 1 x 1 m Crocco Rome, Italie
1904 1.2 m diamètre Riabouchinski Koutchino, Moscow, Russie
1908 2 x 2 m Prandtl Gottingen, Allemagne
1909 1.5 m diamètre Eiffel Champ de Mars, France
1910 4 x 4 ft n/a National Physical Laboratory, Grande Bretagne
1912 7 x 7 ft n/a National Physical Laboratory, Grande Bretagne
1912 2 m diamètre Eiffel Auteuil, France
1912 n/a Junkers Aachen, Allemeagne
1913 8 x 8 ft Zahm Washington Navy Yard,
1914 4 x 4 ft Hunsaker MIT, USA
1916 2.2 x 2.2 m Prandtl Gottingen, Allemagne
1917 5.5 ft diamètre Durand Stanford University, USA
1917 7 ft diamètre Curtiss Hempstead, New York,
1918 7 x 14 ft n/a National Physical Laboratory, Grande Bretagne
1918 4.5 ft octogonale n/a Bureau of Standards, USA
1919 4 x 4 ft Ober MIT, USA
1919 7.5 ft diamètre Durand Stanford University, USA
1919 2m de diamètre Hugon ? St Cyr, France

En 1920 le National Advisory Commitee for Aeronautics (NACA) construira sa première soufflerie, elle ne sera pas très efficace mais permettra aux ingénieurs de Langsley Field (Virginie) de se familiariser avec les problèmes et aboutira en 1921 à la construction de la première soufflerie pressurisée opérationnelle en 1923. Augmenter la pression de l’air, augmente sa densité et permet une très bonne similitude entre une maquette et un avion réel (une soufflerie sous 5 bars permet d’utiliser une maquette à l’échelle1/5). Le NACA va constituer une énorme base de données sur les performances de tous les profils d’ailes. ( le NACA sera remplacé en 1958 par la NASA)

On essaye aussi de trouver des idées pour améliorer les performances des souffleries. Vers 1920, William Margoulis, le premier directeur de la soufflerie Eiffel, propose d’utiliser des gaz plus lourds, comme le dioxyde de carbone, refroidis à -20°C. A l’époque cette solution est trop complexe à mettre en œuvre mais c’est l’idée des souffleries cryogéniques dont la première sera conçue au centre NASA de Langley en 1971.
Les souffleries deviennent de plus en plus grosses et de plus en plus rapides.

Antonin Lapresle, collaborateur de la première heure de Gustave Eiffel et second directeur de la soufflerie Eiffel, créera avec Pierre Rebuffet une énorme soufflerie à Meudon pour l’ONERA de 1932 à 1934. Ce bâtiment de 120 m de long et de 25 m de hauteur a 6 ventilateurs de 8,7 m de diamètre qui soufflent à 180 km/h. Elle est l’égale des grandes souffleries de l’époque à la NACA ( Langley) ou au TsAGI ( Moscou) et essayera des avions réels jusqu'à 12 m d’envergure avec pilote et moteurs en marche jusqu’en 1970.

Ensuite la France prendra avec retard le virage vers le supersonique que l’Allemagne réussit avec la mise en service en 1939 de la soufflerie de Peenemünde qui atteint Mach 4,4 durant … 15 secondes. Elle servira à concevoir V1 et V2. Après la guerre c’est d’ailleurs une équipe Allemande « récupérée » et fixée à Emmendigen, en zone d’occupation française, qui concevra partiellement la grande soufflerie supersonique de Vernon. Celle ci essayera la maquette de la première fusée française: Véronique ( VERnon electrONIQUE)

Le Cx  ( coefficient de trainée aérodynamique de quelques objets
Si après la seconde guerre mondiale les souffleries pour l’aviation évolueront vers les grandes vitesses, les souffleries « classiques » trouveront de nouvelles applications.

C’est d’abord tous les constructeurs automobiles qui concevront leurs modèles avec des souffleries. Avant guerre la soufflerie était surtout employée pour les voitures de sport, elle va devenir l’outil indispensable non seulement pour la forme de la carrosserie mais pour tous les composants.
Quelle forme doit avoir une carrosserie d’automobile ? Pour Eiffel un corps caréné idéal devait avoir une forme fuselé de proportion optimales 3,5 <L/D<4. Un corps caréné a un comportement différent dans l’air et prés du sol car la trainée augmente alors par décollement de la couche limite. Jaray, dés 1922, essaya des profils de carrosserie dérivés des ailes d’avion. Malheureusement une aile a de la portance ce qui rend aléatoire la tenue de route. Maubussin proposa en 1933 une carrosserie en aile d’avion symétrique positionnée verticalement. Finalement les carrosseries devinrent une combinaison d’une aile horizontale et d’une autre verticale.
Profil Eiffel en 1906  et la « jamais contente «  de Jenatzy en 1899 alors que l'on croit encore qu'il faut "fendre" l'air


Carène Jarey vers 1950 et Prototype DB ( Deutsh-Bonnet) vers 1960


Les bâtiments et les ouvrages d’art vont avoir des formes de plus en plus compliquées et utiliseront des solutions techniques nouvelles, la soufflerie servira d’abord à calculer leur résistance ( Eiffel l’avait déjà fait à son époque) mais on l’utilisera aussi pour améliorer le confort des espaces ouverts. On essaiera ensuite des sites urbains complets.
Eiffel mesure l’écoulement d’air sur des obstacles de tailles différentes et constate toujours une dépression à l’arrière de l’obstacle. Il entreprend alors des expériences sur des maquettes d’hangars de dirigeable. Les dépressions relevées atteignent 205daN/m2 pour des vents de 40m/s, seule la paroi directement exposée au vent est en surpression. Ce qui est nouveau pour l’époque, c’est que l’on ne parlait que de pression exercée par le vent et jamais de dépression. L’envol des toitures était interprété comme le résultat d’un vent ascendant et pas comme celui d’une dépression causée par un vent latéral.
La méthode réglementaire actuelle considère la pression cinétique exercée par le vent q=1/2ρV²(soit 120daN/m2 pour un vent de 44,2m/s (159,2km/h, valeur réglementaire pour le calcul des constructions en Martinique et la Guadeloupe). On définit 2 coefficients de pression intérieure et extérieure Ci et Ce , chaque paroi doit résister à q(Ce- Ci)
Pour les édifices de grande hauteur, les différences de pression cinétique entre la base et le sommet doit être prise en compte. Elle est due à la présence de la couche limite terrestre dont la hauteur varie entre 300 et 500 m selon qu’il s’agit d’un site en rase campagne ou du centre d’une ville. Il en résulte une position du centre de poussée située au-dessus de la mi-hauteur et des couples de renversements élevés. Le profilage des bâtiments selon la direction des vents dominants permet de réduire les coefficients de traînée et par conséquent les efforts aérodynamiques.
Dans toutes les situations complexes il faut recourir à la soufflerie.
Relevés d’Eiffel sur une maquette d’hangar de dirigeables Coefficients Ce et Ci pour une construction ouverte à toiture en voute de génératrice circulaire

Tous les véhicules (bateaux, train, coussins d’air,…) vont être testés en soufflerie globalement ou par élément.
Etudes pour la route des tamarins à la Réunion (falaise, tablier de pont), du TGV et du panache des cheminées d’un paquebot dans une soufflerie du CSTB à Nantes

On essayera aussi tous les dispositifs ayant un rapport avec l’aérodynamique comme bien sur la ventilation.
Une application nouvelle va être d’essayer des objets en reproduisant des conditions climatiques particulières (brouillard, neige, température, humidité, sable),

On va s’intéresser aux effets vibratoires du vent ( aéroélasticité).ou au bruit qu’il induit ( aéroacoustique).


Un problème courant est d’éviter que le vent n’excite la fréquence de résonance des structures. Celle-ci est fonction de la masse et de la rigidité. Plus une structure est massive et plus la fréquence est basse, plus elle est rigide et plus sa fréquence est haute. Pour éviter une résonance gênante on peut jouer sur la fréquence ou installer des dispositifs d’amortissement.
Une première cause de vibration est la formation de tourbillons dus à la turbulence qui se détachent de la structure périodiquement en provoquant des motifs appelés allée de tourbillons de Karman. Ce phénomène, qui ne se produit que pour certains Reynolds, excite la structure à une certaine fréquence.
C'est ce  phénomène qui a entrainé la destruction des tours de refroidissement d’une centrale à charbon à Feyribridge ( GB) en 1968.
Si on veut le simuler sur une maquette c’est le nombre de Strouhal qu’il faut respecter dans la similitude, soit fcL/V ou fc est la fréquence d’émission des tourbillons, L la longueur caractéristique et V la vitesse. Comme ce nombre est généralement constant il faut s'attendre à ce qu’une maquette à l’échelle 1/N vibre a une fréquence N fois plus élevée que la réalité. De même si on veut étudier le régime d’excitation forcée il faut utiliser une fréquence N fois supérieure à celle visée.

L’autre phénomène, sensible en particulier pour les ponts suspendus, est celui du flottement. Le vent peut soulever le tablier en l’inclinant ce qui créé un couple de torsion antagoniste et augmente la portance jusqu’au décrochage au delà d’un certain angle. Le tablier prend alors un mouvement contraire et une oscillation se créée. Pour éviter le flottement il faut un tablier le plus rigide et le plus fin possible. On peut aussi profiler les cotés du pont, disposer des amortisseurs ou … élargir le tablier.
La destruction par le vent la plus célèbre est celle du pont de Tacoma en 1940.

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