Dès le début du XVIII éme siècle l’homme pense que voler comme les oiseaux n’est pas un rêve bien que les théoriciens ne soient pas très optimistes quant à cette possibilité : il faut faire des essais.
Les études en aérodynamique progressent grâce à deux inventions : le manège d’essai de Benjamin Robins (1707-1751) et le tube de Pitot (1695-17771). Les travaux de l’époque tentent de trouver la loi de résistance de l’air pour des formes simples ou de tester l’efficacité de formes d’ailes. Une idée s’impose peu à peu : il suffit d’un moteur et d’une hélice qui donnera de la vitesse à l’engin et si celui-ci à la forme appropriée il décollera.
Plus tard on suspend les prototypes à des câbles ou on les installe sur des voitures ou sur des trains. Il n’est pas alors évident qu’il est équivalent de faire se déplacer un objet à une certaine vitesse ou de le laisser fixe et de le soumettre à un courant d’air de la même vitesse.
C’est en 1871 qu’apparait la première soufflerie construite en Angleterre par Francis Wenham. C’est un tunnel de 4m de long, son ventilateur est mu par une machine à vapeur.
Peu après la course au décollage du plus lourd que l’air s’accélère. Langley construit un grand manège d’essai et lance son prototype à l’aide d’une catapulte sur le Potomac.
En 1901 les frères Wright testent une maquette de leur merveilleux engin dans une soufflerie et ils décolleront deux ans plus tard.
En France beaucoup s’intéressent à l’aéronautique.
Clément Ader construit successivement 3 avions de 1890 à 1897 dont personne ne sait vraiment s’ils ont quitté le sol.
Le colonel Charles Renard fonde l’établissement central de l’aérostation militaire en 1877 à Meudon.
Le capitaine Ferdinand Ferber y fait des essais de planeur sur fil tendu. Le planeur prend de la vitesse suspendu au fil, en bout de course le planeur se décroche et réalise un vol d’une cinquantaine de mètres.
C’est aussi le temps des amateurs fortunés : Armand de Gramont, duc de Guiche, consacre une partie de sa fortune à des expériences d’aérodynamique avant la guerre mais… se tourne ensuite vers l’optique.
Eiffel fait partie des amateurs fortunés. Il sera très tôt préoccupé par la résistance de ses ouvrages au vent mais ne s’investira vraiment dans l’aérodynamique qu’après s’être complètement retiré des affaires après le scandale de Panama en 1889.
Après ses démêlés judiciaires il s’intéresse à la météorologie puis, vers 1900, à l’aérodynamique : il a alors 68 ans mais il lui reste 23 ans à vivre.
Il constate qu’à la question de savoir quelle masse peut soulever une aile « les chiffres de avancées par les premières expériences (Wright, Ferber) varient du simple au décuple » et même que pour la valeur primordiale de la résistance spécifique de l’air sur un plan normal au vent, les chiffres entre Dines, Langley et Lilienthal varient du simple au double ». Il décide de faire sur ses propres fonds des expériences. Il s’adjoint une équipe avec Léon Rith et Auguste Lapresle et installe un appareil de chute au second étage de la tour Eiffel. L’appareil descend par gravité et enregistre simultanément la résistance et la position à l’aide d’un cylindre tournant entrainé par un galet qui roule sur le cable. Pour obtenir la vitesse, le stylet d’écriture est monté sur un diapason : le tracé résultant est ainsi gradué en temps par les petites ondulations sinusoïdales du diapason. L’appareil (exposé aujourd’hui à l’intérieur de la soufflerie d’Auteuil) chute sur 115m et atteint une vitesse de 40m/s. Eiffel confirme ainsi que la résistance de l’air (R) s’obtient par la formule :
Il publie ses résultats en 1906 dans « recherches expérimentales sur la résistance de l’air à la tour Eiffel » , ils corroborent les résultats obtenus par d’autres sur des formes simples comme Stanton au National Physical Laboratory et en apportent de nouveaux sur les profils d’ailes.
Pour aller plus loin Eiffel fait construire en 1905, toujours à ses frais, une soufflerie au Champ de Mars pour laquella il déposera un brevet seulement en 1917. C’est « Un ventilateur aspirant d’une puissance de 70 chevaux fait passer dans une chambre d’expériences parfaitement close une colonne d’air ayant un diamètre de 1,50 mètre et une vitesse de 5 à 20 mètres par seconde, sans qu’il en résulte aucun remous dans cette chambre. La surface essayée, placée dans ce courant, est reliée à une balance spéciale qui donne l’effort en grandeur, direction et point d’application. La vitesse est mesurée à l’aide d’un tube Pitot relié à un manomètre très sensible. En outre, on détermine la répartition des pressions aux différents points de la surface en perçant celle-ci de trous très fins que l’on fait communiquer avec un manomètre très sensible ».
La soufflerie du Champ de Mars est jugé inesthétique, aussi Eiffel doit il construire une nouvelle soufflerie à Auteuil : c’est l’actuelle soufflerie du 67 rue Boileau. Elle est un peu plus grande avec deux tunnels l’un de 2M permettant une vitesse de 30m/s l’autre de 1m permettant 50m/s. L’originalité de ces souffleries est qu’il ne s’agit pas de simples tunnels de section constante mais d’un collecteur d’air allant s’amincissant vers une chambre d’expérience rectangulaire suivie d’un diffuseur allant s’élargissant vers le ventilateur. Cette disposition permet une vitesse supérieure au niveau de l’objet essayé et garanti un flux homogène.
Du coté universitaire c’est grâce à la donation d’Henry Deutsch de la Meurthe que sera créé l’institut aérotechnique (IAT) à St Cyr pour "poursuivre les recherches théoriques et pratiques tendant au perfectionnement des engins de la locomotion aérienne sous toutes ses formes". Inauguré en 1911, il comporte une voie ferrée de 1400m de long. Le matériel à tester est monté sur des wagons qui peuvent atteindre 80km/h.. En 1912 on ajoute un manège de 19 m de rayon pouvant atteindre 100km/h.
L’IAT, sous la direction de Charles Maurain, s’était donc orientée vers le déplacement dans l’air des objets plutôt que vers les souffleries mais les bons résultats de la soufflerie d’Auteuil font décider en 1914 de construire une soufflerie « système Eiffel » qui ne sera achevée qu’en 1919.
L’Allemagne est très active, particulièrement à Göttingen. Là travaille Prandtl, le directeur de l’institut de mécanique des fluides Max Planck. En 1908 il fait construire sa première soufflerie de 2m qui sera la première à être en circuit fermé, c'est-à-dire que l’air expulsé par le ventilateur est reconduit par un tunnel circulaire à l’entrée de la chambre d’expérience.
Prandtl invente aussi une sonde (tube de Pitot double) qui va permettre de mesurer la vitesse d’un avion par rapport au vent. Cette « antenne de Prandtl » équipera tous les avions mais sera appelé « tube de Pitot ». (Pitotrohr en allemand)
En 1916 il fera bâtir une seconde soufflerie qui reprendra le circuit fermé mais aussi le collecteur d’Eiffel et est l’archétype des souffleries modernes.
En Angleterre c’est au National Physical Laboratory que se déroulent les expériences. Thomas Stanton construit en 1903 une soufflerie de 60 cm de diamètre. Une nouvelle soufflerie de 1,2m x 1,2m est mise en service en 1910 puis une plus grande de 2,1 m x 2,1m en 1912. Notons que dés 1883 O. Reynolds propose d’utiliser VL/v (le nombre de Reynolds sans la masse volumique) pour faire des essais comparables à la réalité sur des maquettes à échelle réduite.
En Russie Joukoswski s’intéresse à l’effet Magnus qui explique pourquoi une balle en rotation voit sa trajectoire modifiée. L’effet de frottement est dissymétrique : d’un coté la balle entraine l’air, la pression diminue, de l’autre elle le freine, la pression augmente. La différence de pression entraine le mouvement vers le coté ou la pression est la plus faible. Ce phénomène explique non seulement les lifts du tennis mais est à la base de la compréhension de la portance des ailes.
Joukovski et Riabouchinski construisent en 1902 leur première soufflerie à Koutchino près de Moscou et fondent en 1904 l’institut de recherches aérodynamique russe qui deviendra l’institut central d’aérodynamique (TsAGI) après la révolution d’Octobre.
En étudiant les écoulements dérivant d’un potentiel, Joukovski obtiendra des profils d’aile dérivés par transformation conforme d’un cercle. Très utilisés au début de l’aviation ces profils sont pratiquement abandonnés aujourd’hui car ils demandent un raccordement tangentiel des faces supérieure (extrados) et inférieure (intrados) au bord de fuite très difficile à réaliser. Les profils actuels sont beaucoup moins « cambrés » que ceux de Joukovski.
Aux Etats Unis, c’est Albert Zahm qui fait construire à Washington dès 1901 une soufflerie grâce aux fonds d’un industriel. Il réalise de nombreux travaux sur les ailes mais son mécène meurt en 1908 entrainant l’arrêt de ses travaux. Ce n’est qu’en 1913 qu’il pourra les reprendre avec l’appui de la Navy.
A la fin de la première guerre mondiale on comptera une vingtaine de souffleries dans le monde.
En 1920 le National Advisory Commitee for Aeronautics (NACA) construira sa première soufflerie, elle ne sera pas très efficace mais permettra aux ingénieurs de Langsley Field (Virginie) de se familiariser avec les problèmes et aboutira en 1921 à la construction de la première soufflerie pressurisée opérationnelle en 1923. Augmenter la pression de l’air, augmente sa densité et permet une très bonne similitude entre une maquette et un avion réel (une soufflerie sous 5 bars permet d’utiliser une maquette à l’échelle1/5). Le NACA va constituer une énorme base de données sur les performances de tous les profils d’ailes. ( le NACA sera remplacé en 1958 par la NASA)
On essaye aussi de trouver des idées pour améliorer les performances des souffleries. Vers 1920, William Margoulis, le premier directeur de la soufflerie Eiffel, propose d’utiliser des gaz plus lourds, comme le dioxyde de carbone, refroidis à -20°C. A l’époque cette solution est trop complexe à mettre en œuvre mais c’est l’idée des souffleries cryogéniques dont la première sera conçue au centre NASA de Langley en 1971.
Les souffleries deviennent de plus en plus grosses et de plus en plus rapides.
Antonin Lapresle, collaborateur de la première heure de Gustave Eiffel et second directeur de la soufflerie Eiffel, créera avec Pierre Rebuffet une énorme soufflerie à Meudon pour l’ONERA de 1932 à 1934. Ce bâtiment de 120 m de long et de 25 m de hauteur a 6 ventilateurs de 8,7 m de diamètre qui soufflent à 180 km/h. Elle est l’égale des grandes souffleries de l’époque à la NACA ( Langley) ou au TsAGI ( Moscou) et essayera des avions réels jusqu'à 12 m d’envergure avec pilote et moteurs en marche jusqu’en 1970.
Ensuite la France prendra avec retard le virage vers le supersonique que l’Allemagne réussit avec la mise en service en 1939 de la soufflerie de Peenemünde qui atteint Mach 4,4 durant … 15 secondes. Elle servira à concevoir V1 et V2. Après la guerre c’est d’ailleurs une équipe Allemande « récupérée » et fixée à Emmendigen, en zone d’occupation française, qui concevra partiellement la grande soufflerie supersonique de Vernon. Celle ci essayera la maquette de la première fusée française: Véronique ( VERnon electrONIQUE)
Si après la seconde guerre mondiale les souffleries pour l’aviation évolueront vers les grandes vitesses, les souffleries « classiques » trouveront de nouvelles applications.
C’est d’abord tous les constructeurs automobiles qui concevront leurs modèles avec des souffleries. Avant guerre la soufflerie était surtout employée pour les voitures de sport, elle va devenir l’outil indispensable non seulement pour la forme de la carrosserie mais pour tous les composants.
Les bâtiments et les ouvrages d’art vont avoir des formes de plus en plus compliquées et utiliseront des solutions techniques nouvelles, la soufflerie servira d’abord à calculer leur résistance ( Eiffel l’avait déjà fait à son époque) mais on l’utilisera aussi pour améliorer le confort des espaces ouverts. On essaiera ensuite des sites urbains complets.
Tous les véhicules (bateaux, train, coussins d’air,…) vont être testés en soufflerie globalement ou par élément.
On essayera aussi tous les dispositifs ayant un rapport avec l’aérodynamique comme bien sur la ventilation.
Une application nouvelle va être d’essayer des objets en reproduisant des conditions climatiques particulières (brouillard, neige, température, humidité, sable),
On va s’intéresser aux effets vibratoires du vent ( aéroélasticité).ou au bruit qu’il induit ( aéroacoustique).
Les études en aérodynamique progressent grâce à deux inventions : le manège d’essai de Benjamin Robins (1707-1751) et le tube de Pitot (1695-17771). Les travaux de l’époque tentent de trouver la loi de résistance de l’air pour des formes simples ou de tester l’efficacité de formes d’ailes. Une idée s’impose peu à peu : il suffit d’un moteur et d’une hélice qui donnera de la vitesse à l’engin et si celui-ci à la forme appropriée il décollera.
Plus tard on suspend les prototypes à des câbles ou on les installe sur des voitures ou sur des trains. Il n’est pas alors évident qu’il est équivalent de faire se déplacer un objet à une certaine vitesse ou de le laisser fixe et de le soumettre à un courant d’air de la même vitesse.
C’est en 1871 qu’apparait la première soufflerie construite en Angleterre par Francis Wenham. C’est un tunnel de 4m de long, son ventilateur est mu par une machine à vapeur.
Peu après la course au décollage du plus lourd que l’air s’accélère. Langley construit un grand manège d’essai et lance son prototype à l’aide d’une catapulte sur le Potomac.
En 1901 les frères Wright testent une maquette de leur merveilleux engin dans une soufflerie et ils décolleront deux ans plus tard.

Clément Ader construit successivement 3 avions de 1890 à 1897 dont personne ne sait vraiment s’ils ont quitté le sol.
Le colonel Charles Renard fonde l’établissement central de l’aérostation militaire en 1877 à Meudon.
Le capitaine Ferdinand Ferber y fait des essais de planeur sur fil tendu. Le planeur prend de la vitesse suspendu au fil, en bout de course le planeur se décroche et réalise un vol d’une cinquantaine de mètres.
C’est aussi le temps des amateurs fortunés : Armand de Gramont, duc de Guiche, consacre une partie de sa fortune à des expériences d’aérodynamique avant la guerre mais… se tourne ensuite vers l’optique.
Eiffel fait partie des amateurs fortunés. Il sera très tôt préoccupé par la résistance de ses ouvrages au vent mais ne s’investira vraiment dans l’aérodynamique qu’après s’être complètement retiré des affaires après le scandale de Panama en 1889.
Après ses démêlés judiciaires il s’intéresse à la météorologie puis, vers 1900, à l’aérodynamique : il a alors 68 ans mais il lui reste 23 ans à vivre.
Il constate qu’à la question de savoir quelle masse peut soulever une aile « les chiffres de avancées par les premières expériences (Wright, Ferber) varient du simple au décuple » et même que pour la valeur primordiale de la résistance spécifique de l’air sur un plan normal au vent, les chiffres entre Dines, Langley et Lilienthal varient du simple au double ». Il décide de faire sur ses propres fonds des expériences. Il s’adjoint une équipe avec Léon Rith et Auguste Lapresle et installe un appareil de chute au second étage de la tour Eiffel. L’appareil descend par gravité et enregistre simultanément la résistance et la position à l’aide d’un cylindre tournant entrainé par un galet qui roule sur le cable. Pour obtenir la vitesse, le stylet d’écriture est monté sur un diapason : le tracé résultant est ainsi gradué en temps par les petites ondulations sinusoïdales du diapason. L’appareil (exposé aujourd’hui à l’intérieur de la soufflerie d’Auteuil) chute sur 115m et atteint une vitesse de 40m/s. Eiffel confirme ainsi que la résistance de l’air (R) s’obtient par la formule :
R= KSV²
Ou S est la surface, V la vitesse et K un coefficient dépendant de la forme et de la densité de l’air.Il publie ses résultats en 1906 dans « recherches expérimentales sur la résistance de l’air à la tour Eiffel » , ils corroborent les résultats obtenus par d’autres sur des formes simples comme Stanton au National Physical Laboratory et en apportent de nouveaux sur les profils d’ailes.
Pour aller plus loin Eiffel fait construire en 1905, toujours à ses frais, une soufflerie au Champ de Mars pour laquella il déposera un brevet seulement en 1917. C’est « Un ventilateur aspirant d’une puissance de 70 chevaux fait passer dans une chambre d’expériences parfaitement close une colonne d’air ayant un diamètre de 1,50 mètre et une vitesse de 5 à 20 mètres par seconde, sans qu’il en résulte aucun remous dans cette chambre. La surface essayée, placée dans ce courant, est reliée à une balance spéciale qui donne l’effort en grandeur, direction et point d’application. La vitesse est mesurée à l’aide d’un tube Pitot relié à un manomètre très sensible. En outre, on détermine la répartition des pressions aux différents points de la surface en perçant celle-ci de trous très fins que l’on fait communiquer avec un manomètre très sensible ».
La soufflerie du Champ de Mars est jugé inesthétique, aussi Eiffel doit il construire une nouvelle soufflerie à Auteuil : c’est l’actuelle soufflerie du 67 rue Boileau. Elle est un peu plus grande avec deux tunnels l’un de 2M permettant une vitesse de 30m/s l’autre de 1m permettant 50m/s. L’originalité de ces souffleries est qu’il ne s’agit pas de simples tunnels de section constante mais d’un collecteur d’air allant s’amincissant vers une chambre d’expérience rectangulaire suivie d’un diffuseur allant s’élargissant vers le ventilateur. Cette disposition permet une vitesse supérieure au niveau de l’objet essayé et garanti un flux homogène.
Du coté universitaire c’est grâce à la donation d’Henry Deutsch de la Meurthe que sera créé l’institut aérotechnique (IAT) à St Cyr pour "poursuivre les recherches théoriques et pratiques tendant au perfectionnement des engins de la locomotion aérienne sous toutes ses formes". Inauguré en 1911, il comporte une voie ferrée de 1400m de long. Le matériel à tester est monté sur des wagons qui peuvent atteindre 80km/h.. En 1912 on ajoute un manège de 19 m de rayon pouvant atteindre 100km/h.
L’IAT, sous la direction de Charles Maurain, s’était donc orientée vers le déplacement dans l’air des objets plutôt que vers les souffleries mais les bons résultats de la soufflerie d’Auteuil font décider en 1914 de construire une soufflerie « système Eiffel » qui ne sera achevée qu’en 1919.
L’Allemagne est très active, particulièrement à Göttingen. Là travaille Prandtl, le directeur de l’institut de mécanique des fluides Max Planck. En 1908 il fait construire sa première soufflerie de 2m qui sera la première à être en circuit fermé, c'est-à-dire que l’air expulsé par le ventilateur est reconduit par un tunnel circulaire à l’entrée de la chambre d’expérience.
Prandtl invente aussi une sonde (tube de Pitot double) qui va permettre de mesurer la vitesse d’un avion par rapport au vent. Cette « antenne de Prandtl » équipera tous les avions mais sera appelé « tube de Pitot ». (Pitotrohr en allemand)
En 1916 il fera bâtir une seconde soufflerie qui reprendra le circuit fermé mais aussi le collecteur d’Eiffel et est l’archétype des souffleries modernes.
En Angleterre c’est au National Physical Laboratory que se déroulent les expériences. Thomas Stanton construit en 1903 une soufflerie de 60 cm de diamètre. Une nouvelle soufflerie de 1,2m x 1,2m est mise en service en 1910 puis une plus grande de 2,1 m x 2,1m en 1912. Notons que dés 1883 O. Reynolds propose d’utiliser VL/v (le nombre de Reynolds sans la masse volumique) pour faire des essais comparables à la réalité sur des maquettes à échelle réduite.
Joukovski et Riabouchinski construisent en 1902 leur première soufflerie à Koutchino près de Moscou et fondent en 1904 l’institut de recherches aérodynamique russe qui deviendra l’institut central d’aérodynamique (TsAGI) après la révolution d’Octobre.
En étudiant les écoulements dérivant d’un potentiel, Joukovski obtiendra des profils d’aile dérivés par transformation conforme d’un cercle. Très utilisés au début de l’aviation ces profils sont pratiquement abandonnés aujourd’hui car ils demandent un raccordement tangentiel des faces supérieure (extrados) et inférieure (intrados) au bord de fuite très difficile à réaliser. Les profils actuels sont beaucoup moins « cambrés » que ceux de Joukovski.
Aux Etats Unis, c’est Albert Zahm qui fait construire à Washington dès 1901 une soufflerie grâce aux fonds d’un industriel. Il réalise de nombreux travaux sur les ailes mais son mécène meurt en 1908 entrainant l’arrêt de ses travaux. Ce n’est qu’en 1913 qu’il pourra les reprendre avec l’appui de la Navy.
A la fin de la première guerre mondiale on comptera une vingtaine de souffleries dans le monde.
Date | Taille | Auteur | Emplacement |
1901 | 16 x 16 in. | Wright Bros. | Dayton, Ohio |
1901 | 6 x 6 ft | Zahm | Catholic University, Washington |
1903 | 2 ft diamètre | Stanton | National Physical Laboratory, Grande Bretagne |
1903 | 1 x 1 m | Crocco | Rome, Italie |
1904 | 1.2 m diamètre | Riabouchinski | Koutchino, Moscow, Russie |
1908 | 2 x 2 m | Prandtl | Gottingen, Allemagne |
1909 | 1.5 m diamètre | Eiffel | Champ de Mars, France |
1910 | 4 x 4 ft | n/a | National Physical Laboratory, Grande Bretagne |
1912 | 7 x 7 ft | n/a | National Physical Laboratory, Grande Bretagne |
1912 | 2 m diamètre | Eiffel | Auteuil, France |
1912 | n/a | Junkers | Aachen, Allemeagne |
1913 | 8 x 8 ft | Zahm | Washington Navy Yard, |
1914 | 4 x 4 ft | Hunsaker | MIT, USA |
1916 | 2.2 x 2.2 m | Prandtl | Gottingen, Allemagne |
1917 | 5.5 ft diamètre | Durand | Stanford University, USA |
1917 | 7 ft diamètre | Curtiss | Hempstead, New York, |
1918 | 7 x 14 ft | n/a | National Physical Laboratory, Grande Bretagne |
1918 | 4.5 ft octogonale | n/a | Bureau of Standards, USA |
1919 | 4 x 4 ft | Ober | MIT, USA |
1919 | 7.5 ft diamètre | Durand | Stanford University, USA |
1919 | 2m de diamètre | Hugon ? | St Cyr, France |
En 1920 le National Advisory Commitee for Aeronautics (NACA) construira sa première soufflerie, elle ne sera pas très efficace mais permettra aux ingénieurs de Langsley Field (Virginie) de se familiariser avec les problèmes et aboutira en 1921 à la construction de la première soufflerie pressurisée opérationnelle en 1923. Augmenter la pression de l’air, augmente sa densité et permet une très bonne similitude entre une maquette et un avion réel (une soufflerie sous 5 bars permet d’utiliser une maquette à l’échelle1/5). Le NACA va constituer une énorme base de données sur les performances de tous les profils d’ailes. ( le NACA sera remplacé en 1958 par la NASA)
On essaye aussi de trouver des idées pour améliorer les performances des souffleries. Vers 1920, William Margoulis, le premier directeur de la soufflerie Eiffel, propose d’utiliser des gaz plus lourds, comme le dioxyde de carbone, refroidis à -20°C. A l’époque cette solution est trop complexe à mettre en œuvre mais c’est l’idée des souffleries cryogéniques dont la première sera conçue au centre NASA de Langley en 1971.
Les souffleries deviennent de plus en plus grosses et de plus en plus rapides.

Ensuite la France prendra avec retard le virage vers le supersonique que l’Allemagne réussit avec la mise en service en 1939 de la soufflerie de Peenemünde qui atteint Mach 4,4 durant … 15 secondes. Elle servira à concevoir V1 et V2. Après la guerre c’est d’ailleurs une équipe Allemande « récupérée » et fixée à Emmendigen, en zone d’occupation française, qui concevra partiellement la grande soufflerie supersonique de Vernon. Celle ci essayera la maquette de la première fusée française: Véronique ( VERnon electrONIQUE)
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Le Cx ( coefficient de trainée aérodynamique de quelques objets |
C’est d’abord tous les constructeurs automobiles qui concevront leurs modèles avec des souffleries. Avant guerre la soufflerie était surtout employée pour les voitures de sport, elle va devenir l’outil indispensable non seulement pour la forme de la carrosserie mais pour tous les composants.
Les bâtiments et les ouvrages d’art vont avoir des formes de plus en plus compliquées et utiliseront des solutions techniques nouvelles, la soufflerie servira d’abord à calculer leur résistance ( Eiffel l’avait déjà fait à son époque) mais on l’utilisera aussi pour améliorer le confort des espaces ouverts. On essaiera ensuite des sites urbains complets.
Tous les véhicules (bateaux, train, coussins d’air,…) vont être testés en soufflerie globalement ou par élément.
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![]() | ![]() | ![]() |
Etudes pour la route des tamarins à la Réunion (falaise, tablier de pont), du TGV et du panache des cheminées d’un paquebot dans une soufflerie du CSTB à Nantes |
On essayera aussi tous les dispositifs ayant un rapport avec l’aérodynamique comme bien sur la ventilation.
Une application nouvelle va être d’essayer des objets en reproduisant des conditions climatiques particulières (brouillard, neige, température, humidité, sable),
On va s’intéresser aux effets vibratoires du vent ( aéroélasticité).ou au bruit qu’il induit ( aéroacoustique).
Un problème courant est d’éviter que le vent n’excite la fréquence de résonance des structures. Celle-ci est fonction de la masse et de la rigidité. Plus une structure est massive et plus la fréquence est basse, plus elle est rigide et plus sa fréquence est haute. Pour éviter une résonance gênante on peut jouer sur la fréquence ou installer des dispositifs d’amortissement. Une première cause de vibration est la formation de tourbillons dus à la turbulence qui se détachent de la structure périodiquement en provoquant des motifs appelés allée de tourbillons de Karman. Ce phénomène, qui ne se produit que pour certains Reynolds, excite la structure à une certaine fréquence. C'est ce phénomène qui a entrainé la destruction des tours de refroidissement d’une centrale à charbon à Feyribridge ( GB) en 1968. Si on veut le simuler sur une maquette c’est le nombre de Strouhal qu’il faut respecter dans la similitude, soit fcL/V ou fc est la fréquence d’émission des tourbillons, L la longueur caractéristique et V la vitesse. Comme ce nombre est généralement constant il faut s'attendre à ce qu’une maquette à l’échelle 1/N vibre a une fréquence N fois plus élevée que la réalité. De même si on veut étudier le régime d’excitation forcée il faut utiliser une fréquence N fois supérieure à celle visée. L’autre phénomène, sensible en particulier pour les ponts suspendus, est celui du flottement. Le vent peut soulever le tablier en l’inclinant ce qui créé un couple de torsion antagoniste et augmente la portance jusqu’au décrochage au delà d’un certain angle. Le tablier prend alors un mouvement contraire et une oscillation se créée. Pour éviter le flottement il faut un tablier le plus rigide et le plus fin possible. On peut aussi profiler les cotés du pont, disposer des amortisseurs ou … élargir le tablier. La destruction par le vent la plus célèbre est celle du pont de Tacoma en 1940. |
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